James Wallen, Coordonnateur du Programme paludisme à Speak Up Africa : « J’aimerais voir le Bénin être un leader dans le combat contre le paludisme en Afrique »

Au terme de son séjour au Bénin où il a suivi la validation du Plan national de plaidoyer pour la lutte contre le paludisme et l’atelier d’élaboration des plans d’actions des OSC sélectionnées, le Coordonnateur du programme paludisme à Speak Up Africa, James Wallen nous a accordé un entretien. Impressionné par l’engagement renouvelé de tous les acteurs impliqués dans le combat contre ce fléau, il ne cache pas son optimisme de voir le Bénin atteindre les objectifs contenus dans le plan national de plaidoyer.

Le Bénin vient de valider son Plan national de plaidoyer avec de grandes ambitions dont l’élimination du paludisme d’ici 2030. Est-ce qu’avec ce document stratégique, le Bénin est sur le bon chemin pour vaincre enfin cette maladie ?

Oui, le Bénin est sur le bon chemin. Souvent lorsqu’on est à l’étape de planification des actions à entreprendre, on est souvent très optimiste. On se dit toujours que si toutes les actions prévues et planifiées se réalisent,  on va y arriver. Mais, quand on dépasse cette phase initiale et qu’on entre dans la mise en œuvre, il faut trouver les moyens et les partenaires qui peuvent financer. Un comité de pilotage a été prévu pour travailler à trouver des partenaires. Car, ce n’est pas Speak Up Africa qui seule a les moyens et la capacité de financer toutes les actions. Il faut trouver d’autres partenaires pour mettre en œuvre toutes les actions prévues. Donc, on est sur le bon chemin si on arrive à mettre en œuvre toutes les actions planifiées. On a un joli document mais le vrai travail commence maintenant.

Ce qui est nouveau dans le plan national de plaidoyer, c’est l’implication du secteur privé. A la lumière de votre expérience de suivi d’un tel processus dans les pays de la sous-région, est-ce qu’il y a des chances de convaincre le secteur privé à s’engager pour cette cause ?

On réalise de plus en plus l’importance de l’implication du secteur privé. Pendant longtemps, c’est le fonds mondial, les gouvernements et d’autres partenaires qui financent les programmes nationaux. Le secteur privé constitue une énorme opportunité. On n’a pas vraiment jusque-là son engagement. Plusieurs entreprises ont aujourd’hui des départements ou programmes RSE qui voudraient contribuer à l’atteinte des ODD et elles ont des ressources pour le faire. Maintenant, c’est comment accéder aux entreprises et les engager à contribuer à la mise en œuvre des interventions qui constituent des défis à relever. Dans plusieurs pays, en Afrique, avec l’appui de l’Alliance des dirigeants africains contre le paludisme (ALMA), il y a plusieurs structures comme les Conseils nationaux qui travaillent à engager le secteur privé à travers les membres. Il y a des chefs d’entreprise qui ont leurs réseaux et qui ont une bonne réputation qui peuvent amener des responsables d’entreprise à s’engager. Dans le cadre de l’Initiative « Zéro Palu, les entreprises s’engagent », Speak Up Africa travaille avec Ecobank qui est une banque panafricaine qui a un énorme portefeuille clients. La banque s’emploie à engager ses clients qui sont intéressés. Ainsi, Ecobank mobilise les entreprises et Speak Up Africa accompagne et soutient cette banque en termes de communication. L’initiative  est mise en œuvre dans 5 pays (Burkina-Faso, Sénégal, Bénin, Ouganda et Ghana) et compte déjà des résultats. C’est très important quand on parle de l’engagement du secteur privé. Si on pense aux entreprises de télé-communication comme Orange, MTN… elles peuvent appuyer l’initiative en termes de communication de masse. Parce qu’elles ont de millions de clients. Au Bénin, l’opérateur MTN a envoyé des messages de sensibilisation à ses clients. Dans le secteur privé, les entreprises ont une forte capacité à atteindre leurs clients. Quand vous prenez les entreprises qui sont dans le secteur des mines, elles utilisent la main d’œuvre qu’elles peuvent atteindre. Il faut voir ce qu’elles peuvent faire sur le terrain pour les atteindre surtout en zones reculées. Chaque secteur de l’économie a un potentiel qu’on peut exploiter pour contribuer à la lutte. Il faut juste une stratégie pour savoir comment on les engage. Il faut arriver à exploiter leurs compétences, leurs ressources, leur domaine d’interventions et leurs stratégies.

A la suite de l’atelier de validation du Plan national de plaidoyer, les OSC sélectionnées ont tenu un atelier de planification de leurs actions à mettre en œuvre sur le terrain. Pour vous qui avez suivi cet exercice de planification, est-ce que les OSC retenues sont véritablement préparées à relever le défi par rapport aux objectifs poursuivis par le plan national ?

On a mené un processus d’identification des OSC qui a duré quelques mois suite à un appel à candidatures. On a eu plusieurs OSC qui ont répondu à l’appel à travers tout le Bénin. Sur la base des critères retenus par le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP) et Speak Up Africa, on sait que les  trois OSC retenues ont déjà de l’expérience et la capacité de mener à bien les actions à fort impact. On n’a pas pris n’importe quelle OSC mais celles qui peuvent contribuer à l’atteinte des objectifs de plaidoyer. On est bien confiant et l’atelier d’élaboration des Plans d’actions consistait à aligner leurs actions  sur les objectifs du plan national. Au Bénin, la particularité est que le PNLP a fixé les mêmes objectifs aux 3 OSC mais dans des zones géographiques différentes. Au Sénégal, les objectifs et les cibles sont différents. Il y a une OSC qui travaille avec le secteur privé, une autre avec les autorités locales et la troisième avec les médias. Donc au Bénin, les OSC ont plus ou moins les mêmes activités et les mêmes cibles. Ce qui est différent, c’est qu’au final, on verra quelle approche sera la meilleure au niveau des trois OSC. A Speak Up Africa, on adapte la stratégie d’intervention aux orientations des autorités centrales. Avec la campagne « Zéro Palu je m’engage », il y a donc des orientations générales à savoir l’engagement politique, l’engagement du secteur privé et l’engagement communautaire mais la manière de le faire dépend des pays.

Est-ce qu’avec le plan national et la planification des activités des OSC, le Bénin est préparé désormais à atteindre les Objectifs poursuivis ?  

Je pense que le Bénin est bien situé maintenant pour aller de l’avant et atteindre les objectifs du Plan national. Les acteurs sont engagés et formés. Il y a des documents stratégiques qui vont les guider. Le travail qui reste, c’est la coordination et le suivi de la mise en œuvre des actions planifiées. Le Bénin est bien armé pour montrer aux autres pays africains comment on peut conduire un tel processus. On a constaté que pour la campagne « Zéro palu, les entreprises s’engagent », le Bénin est en avance par rapport aux autres pays. L’engagement au niveau du Bénin de Ecobank, des autres entreprises, des OSC, le PNLP… tout le monde est prêt à agir et déjà appliqué. C’est une opportunité de montrer aux autres pays dans la sous-région et en Afrique, comment ce combat peut être mené. J’aimerais bien voir le Bénin être un leader dans le combat contre le paludisme pour inspirer d’autres pays maintenant qu’il y a les outils, des documents stratégiques et des partenaires.

Originaire du Bénin en Afrique de l’ouest, Alain TOSSOUNON est journaliste depuis plus d’une quinzaine d’années. Rédacteur en Chef puis Directeur de rédaction de l’hebdomadaire spécialisé dans la décentralisation et la gouvernance locale « Le Municipal », il a suivi et validé plusieurs certificats en gestion des ressources naturelles (Université Senghor d’Alexandrie) et en eau avant de passer grand reporter sur les thématiques de l’eau, l’hygiène et l’assainissement de base et l’environnement.
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